news-05092024-021902

Les raisons de la répression de la science en Russie

Alexander Shipliouk, l’une des figures emblématiques de la recherche russe sur les vols hypersoniques, a récemment été condamné à quinze ans de prison pour « haute trahison ». Il s’agit du dernier scientifique en date à avoir été arrêté par le FSB depuis le début de la guerre en Ukraine. Selon des experts interrogés par France 24, il s’agit d’une chasse aux scientifiques politiquement motivée.

Quels sont les liens entre Alexander Shipliouk, Anatoli Maslov et Valery Zvegintsev ? Ces trois physiciens russes de renom travaillant dans le même institut en Sibérie sur des sujets liés au développement des missiles hypersoniques ont tous été arrêtés et accusés de haute trahison ces derniers mois. Alexander Shipliouk a été condamné à une peine de quinze ans dans une prison de haute sécurité pour avoir transmis des « informations sensibles » lors d’une conférence scientifique en Chine en 2017. Son collègue Anatoly Maslov, âgé de 78 ans, a également été condamné à quatorze ans de prison pour des accusations similaires. Quant à Valery Zvegintsev, il risque de subir le même sort, ayant été arrêté au printemps dernier et placé en détention provisoire en attendant son procès.

Cette répression ne se limite pas à ces scientifiques de l’Institut de mécanique théorique et appliquée (Itam) de Sibérie. Alexander Kuranov, un ingénieur de Saint-Pétersbourg impliqué dans le développement d’avions hypersoniques, a été condamné à sept ans de prison pour trahison. En tout, onze spécialistes du secteur des vols hypersoniques ont été arrêtés en Russie depuis 2018, illustrant la dureté du régime russe envers les scientifiques travaillant sur des technologies stratégiques.

La répression s’est intensifiée après le début de l’offensive contre l’Ukraine en février 2022. Selon la BBC, le pouvoir russe cherche à contrôler toute circulation d’informations, en particulier dans des domaines sensibles comme la technologie du vol hypersonique. Cette vague d’arrestations est symptomatique des dérives d’un pouvoir de plus en plus isolé et paranoïaque depuis le début de la guerre.

Les scientifiques russes ne sont pas les seuls à être ciblés par les autorités. En 1953, la fin du règne de Staline a été marquée par un complot antisémite visant des médecins juifs accusés de collusion avec les États-Unis. Cette paranoïa envers l’Occident se retrouve dans les arrestations des scientifiques russes, soupçonnés de trop de proximité avec des pays étrangers. Même les chercheurs qui collaborent avec des nations alliées de la Russie sont pris pour cibles, soulignant le manque de confiance du régime envers sa propre communauté scientifique.

La répression contre les scientifiques russes peut être attribuée à une stratégie des services secrets pour maintenir leur influence. Le FSB, qui a procédé à toutes les arrestations en accusant les scientifiques de trahison, cherche peut-être à renforcer sa position en sacrifiant certains chercheurs. Cependant, cette approche risque de nuire à la recherche scientifique en Russie en isolant le pays sur la scène internationale.

En conclusion, la répression de la science en Russie est le reflet d’un régime paranoïaque et isolé qui craint la collaboration internationale dans des domaines sensibles. Les arrestations de scientifiques renommés pour des motifs politiques mettent en péril la recherche et l’innovation en Russie, mettant en lumière les tensions entre le pouvoir et la communauté scientifique.