La menace de la flotte fantôme russe en Arctique
Des images satellite ont révélé que deux méthaniers ont accosté au port d’Arctic LNG 2 en août, un important projet russe de production de gaz naturel liquéfié (GNL) sanctionné par les États-Unis. Ces navires pourraient faire partie d’une « flotte fantôme » en développement pour exporter le GNL et contourner les sanctions en utilisant de fausses coordonnées GPS et des liens avec des sociétés opaques présumément basées à Dubaï. En réponse, les États-Unis ont ajouté les deux méthaniers à leur liste de sanctions le 23 août.
Un méthanier a attiré l’attention sur une image satellite du 1er août, amarré au port du projet Arctic LNG 2, une usine de liquéfaction de gaz naturel en Sibérie occidentale. Ce projet, exploité par Novatek, vise à produire 19,8 millions de tonnes de GNL par an pour renforcer la position de la Russie sur le marché mondial. Cependant, des retards dans les exportations ont été causés par les sanctions américaines et des difficultés logistiques liées à l’approvisionnement en méthaniers capables d’exporter la production.
Des images satellite prises par la mission Sentinel ont révélé la présence du méthanier au port d’Arctic LNG 2 entre fin juillet et début août. L’analyse des données AIS du navire a révélé des mouvements suspects, suggérant un possible « spoofing » pour cacher ses activités réelles. Ce comportement est typique des « flottes fantômes » qui cherchent à contourner les sanctions en manipulant les informations de localisation.
Le méthanier, identifié comme le Pioneer, aurait transmis des coordonnées GPS erronées pour masquer son emplacement réel. Cette pratique de « spoofing » est courante parmi les navires impliqués dans des activités illicites pour échapper à la détection. L’utilisation de fausses coordonnées peut permettre aux navires de transporter des cargaisons illégales sans être repérés.
Le Pioneer aurait été chargé de GNL lors de son passage au port d’Arctic LNG 2, avec une escale compatible avec le temps nécessaire pour un chargement complet. Les données AIS du navire ont révélé un voyage ultérieur vers le sud, contournant les côtes européennes et se dirigeant vers la Méditerranée. Cependant, la destination exacte de la cargaison reste inconnue, mais des soupçons se portent sur des pays comme l’Inde ou la Chine, moins exposés aux sanctions américaines.
La mise en place d’une « flotte fantôme » pour le transport de GNL est une opération complexe en raison des risques associés au transport de gaz liquéfié. Les méthaniers ne peuvent accoster que dans des ports équipés de terminaux spécialisés, limitant les possibilités de transferts en mer pour brouiller les pistes. De plus, les méthaniers sont plus faciles à suivre que les pétroliers en raison de leur nombre limité et de leurs itinéraires spécifiques.
Le cas du Pioneer n’est pas isolé, avec l’apparition d’autres méthaniers suspects au port d’Arctic LNG 2. L’Asya Energy et l’Everest Energy ont également été repérés, gérés par la même entreprise que le Pioneer. Leurs mouvements ont été similaires, avec des signaux AIS manipulés pour cacher leurs activités. La suspicion de « flotte fantôme » se renforce avec l’implication de sociétés basées à Dubaï et l’utilisation de pavillons de complaisance pour dissimuler la véritable propriété des navires.
La Russie est soupçonnée d’être derrière ces opérations visant à contourner les sanctions américaines et à relancer le projet Arctic LNG 2. Des sociétés opaques établies dans des juridictions peu transparentes sont utilisées pour enregistrer les navires et dissimuler les véritables propriétaires. Cette stratégie permettrait à la Russie de commercer avec des partenaires moins soumis aux pressions américaines et de contourner les restrictions imposées par les sanctions.
En réponse à ces activités suspectes, les États-Unis ont sanctionné les navires impliqués, ainsi que les entreprises responsables de leur gestion. L’objectif est de dissuader la Russie de poursuivre ces pratiques et de renforcer les contrôles sur le transport de GNL en Arctique. La coopération internationale est nécessaire pour empêcher l’exploitation de « flottes fantômes » et garantir la transparence dans le commerce de matières premières.