L’espionnage a une longue histoire et ceux qui le pratiquent n’ignorent rien de ses secrets, de ses progrès, de ses multiples inventions. Ainsi, l’explosion des bipeurs piégés par les Israéliens grâce à des sociétés écrans n’est que la conclusion d’une longue série d’innovations qui ont débuté il y a fort longtemps, comme nous le rappelle Rémi Kauffer. Ce spécialiste de l’histoire du renseignement vient de publier une histoire de la guerre que les principaux services se sont menée durant la Seconde Guerre mondiale.
En 1915, un Français du nom de Joseph Crozier a créé, dans la Hollande neutre, une société de savons. La France a deviné que l’Allemagne, soumise au blocus, importait clandestinement de l’huile de lin des États-Unis. Se faisant passer pour un mauvais Français, il propose aux Allemands d’insérer désormais à l’intérieur de ses savons des doses d’huile de lin, qu’il signale dans le même temps aux douaniers hollandais, qui les saisissent. Cette ruse a été l’une des premières utilisations de sociétés écrans pour le renseignement.
En 1936, Claude Dansey a simuler être renvoyé du MI6 pour créer une société de services internationaux, Z, à Zurich. Ses agents ont infiltré diverses entreprises en Europe, agissant après le déclenchement de la Seconde Guerre mondiale, en 1939. Cette stratégie a permis à Dansey de devenir numéro deux du renseignement britannique. De même, les Français ont utilisé une ruse pendant la guerre d’Algérie en modifiant les motifs sous la semelle des chaussures du FLN pour mieux repérer leurs propriétaires sur le terrain.
Les Anglais, dirigés par Peter Fleming, ont été les premiers à utiliser des colis piégés pour la désinformation en Asie du Sud-Est face au Japon. Les Français ont ensuite imité cette technique en Indochine et en Algérie, où le chef de la wilaya 1, Mostefa Ben Boulaïd, et son état-major ont été tués après avoir récupéré une radio piégée. Cette méthode a été attribuée au service des « farces et attrapes ».
L’ouvrage de Rémi Kauffer, « 1939-1945. La Guerre mondiale des services secrets » (Perrin, 496 p., 25 €), explore en détail l’histoire des pratiques des pionniers du renseignement pendant la Seconde Guerre mondiale. Cet ouvrage offre un aperçu fascinant des stratégies et des innovations utilisées par les services secrets à cette époque cruciale de l’histoire. À travers des exemples concrets comme les sociétés écrans et les colis piégés, Kauffer met en lumière l’ingéniosité et la complexité de l’espionnage à travers l’histoire.