Face aux crues, il est préférable « d’organiser le débordement des fleuves et rivières », estime le professeur en géosciences à l’université de Lille Arnaud Gauthier. Une approche qui implique de reconsidérer le territoire, dans un contexte de dérèglement climatique.
Une conjonction d’événements est à l’origine de ces inondations. L’automne a été marqué par une importante pluviométrie, sans caractère exceptionnel, mais suffisamment importante pour saturer les sols. Un phénomène de tempête s’est ensuite ajouté à de forts coefficients de marée, qui ont par conséquent empêché l’évacuation des eaux de pluie vers la mer. Une évacuation qui a été par ailleurs ralentie en raison de pompes hydrauliques qui n’ont pas systématiquement joué leur rôle. Finalement, les fleuves ont débordé et l’eau s’est accumulée dans de nombreux secteurs du territoire.
Deux grands types de mesures ont été mis en place. Tout d’abord, des chantiers ont été réalisés, en particulier des passages sous certaines routes qui ont été refaits, avec des buses de béton mieux dimensionnées, de manière à favoriser l’écoulement des eaux. Il a été constaté que l’eau avait parfois mis beaucoup de temps à s’évacuer, parce qu’elle s’était heurtée à des barrages naturels ou artificiels, notamment certaines constructions routières.
Après, il y a eu plusieurs épisodes de curages de fleuves ou rivières, plus ou moins anarchiques et médiatiques, réalisés par des paysans ou par des institutions. Je ne suis pas convaincu du bien-fondé de ce type d’actions. En effet, le curage des cours d’eau n’est pas nécessairement la solution idéale. Vous risquez, d’une part, de perturber de manière hydrodynamique l’écoulement du cours d’eau et, d’autre part, de modifier l’écosystème ambiant. Par ailleurs, les actions de curage ne font souvent que déplacer le problème : l’écoulement s’améliore sur le tronçon qui a été curé, mais l’impact sur l’ensemble du cours d’eau reste assez négligeable. L’autre mesure qui a été mise en place, ce sont les procédures d’« expropriation » de différents quartiers, même si le terme est un peu exagéré. Encore aurait-il fallu éviter de délivrer des permis de construire dans des zones inondables.
Malheureusement, si un nouvel épisode pluvieux d’intensité relativement importante se produisait, on risque de revoir apparaître des inondations. Elles seront peut-être plus modérées, du fait des quelques aménagements qui ont été réalisés, mais elles se produiront à nouveau. Vous avez un exemple récent : début août, il y a des pluies peu importantes dans la région et pourtant certaines villes ont été touchées encore une fois par des inondations. Compte tenu du contexte climatique, on risque d’être confronté de plus en plus à ce genre d’épisodes météorologiques, non pas avec des pluies régulières, mais des grosses pluies assez courtes d’une grande intensité qu’il faudra gérer, et ça sera extrêmement compliqué.
C’est dans cette optique qu’avaient été imaginés, à la suite des inondations survenues en 2002, les champs d’inondation contrôlée, c’est-à-dire des parcelles choisies pour être volontairement inondées quand il y a un phénomène de crue. Ces bassins de rétention ont joué leur rôle lors des dernières inondations, mais ils ont été malheureusement sous-calibrés. Ce type d’ouvrages pose toutefois la question de l’aménagement du territoire et de la perception du risque. Or, dans cette région, le foncier n’est pas extensible. On y trouve des zones extrêmement urbanisées ou extrêmement agricoles, voire parfois des endroits où les deux cohabitent tant bien que mal. Enfin, à toutes ces interrogations s’ajoute la question de la temporalité politique : entre le moment où des décisions seront prises et la phase travaux, il se passe un certain temps. Un délai qui répond rarement aux attentes des habitants.
Les défis de l’aménagement du territoire
Face à ces prévisions d’inondations récurrentes, il est crucial de repenser l’aménagement du territoire de manière à anticiper et gérer efficacement les risques. Les experts mettent en avant la nécessité de prendre en compte les changements climatiques et d’adapter les infrastructures pour faire face à des événements météorologiques de plus en plus extrêmes. Cela implique non seulement des investissements dans des infrastructures de prévention des inondations, mais aussi une planification urbaine plus résiliente.
L’importance de la gestion des eaux
La gestion des eaux est un élément clé dans la prévention des inondations. Il est essentiel de développer des stratégies efficaces pour contrôler le débit des rivières et limiter les risques de débordement. Cela passe par la création de bassins de rétention, le curage régulier des cours d’eau et la mise en place de systèmes de drainage adéquats. De plus, il est nécessaire de sensibiliser la population à l’importance de la préservation des zones humides et des écosystèmes naturels qui peuvent jouer un rôle crucial dans l’absorption des eaux en cas d’inondations.
L’urgence d’une action coordonnée
Pour faire face aux défis posés par les inondations récurrentes, il est impératif que les autorités locales, les experts en environnement et les citoyens travaillent ensemble de manière coordonnée. Il est nécessaire de mettre en place des politiques de gestion des risques adaptées, de renforcer la surveillance des cours d’eau et de développer des plans d’intervention d’urgence. Il est également crucial d’impliquer activement les populations locales dans la prise de décisions et de favoriser une approche participative dans la gestion des risques d’inondation.
En conclusion, la prévention des inondations récurrentes nécessite une approche holistique qui intègre à la fois des mesures d’adaptation aux changements climatiques, une gestion efficace des eaux et une coordination entre les différents acteurs impliqués. Il est temps d’agir de manière proactive pour protéger nos territoires et nos populations des risques croissants liés aux événements météorologiques extrêmes.